Au delà des notes

Voici ma réaction à l’article de Mme Pascale Breton, « Bulletin unique: une note basée sur le jugement de l’enseignant ». Texte que je lui ai aussi fait suivre par courriel.

Quelques mots pour vous dire que je trouve que votre article sème un peu de confusion autour des concepts de mesure, d’évaluation, de jugement, de communication et d’instrument de mesure. La démarche évaluative en contexte de développement de compétences ne peut se résumer qu’à un cumul de notes.  De plus, le jugement menant à une décision de l’enseignant doit, comme vous le mentionnez,  reposer sur une variété d’instruments dont les notes, mais pourrait aussi comprendre le portfolio, des grilles d’observation, des entrevues et bien d’autres.

Bref, l’acte même d’évaluer c’est de porter un jugement … et ce depuis que l’évaluation existe, bien avant notre réforme ! Ceci dit, plus particulièrement dans un contexte de développement de compétences, il faut bien plus qu’un cumul de notes pour arriver à situer la progression d’un apprenant puisqu’une compétence est plus complexe à évaluer qu’une connaissance.

« Évaluer l’apprentissage consistera toujours à porter un jugement de valeur – personnel et subjectif – sur cet apprentissage en fonction d’un certain nombre de données recueillies en observant ou en mesurant une performance » (Laurier, Tousignant et Morisette, 2005).

Par contre subjectif ne veut pas dire arbitraire.

Ce qu’il serait aussi intéressant de questionner quand on souhaite aborder l’évaluation des compétences, ce sont les éléments suivants, dans leur ensemble et non pris de façon séparément.

1 – Les compétences des enseignants à évaluer des compétences. Dans quelle mesure, depuis l’arrivée de la réforme, ont-ils reçu des formations ou des perfectionnements adéquats pour leur permettre de développer cette compétence. Dans notre milieu, c’est près de 30 heures de formation qui a été nécessaire pour faire le simple tour de la démarche évaluative.

2 – La quantité de compétences, mais surtout le nombre de critères à évaluer selon le programme nécessitent une coordination étroite des enseignants par cycle. Est-ce que le système permet facilement cette coordination ? Est-ce que le nombre de critères à évaluer est réaliste et facilite la démarche d’évaluation ?

3 – J’ai une autre interrogation quant à la disponibilité des outils d’évaluation pour les enseignants.  Alors qu’il est assez facile d’obtenir des épreuves de la part du MELS, qu’en est-il des grilles analytiques ou descriptives permettant d’évaluer l’ensemble des critères d’évaluation des compétences disciplinaires et non-disciplinaires?

4 – Un seul cours en formation des maîtres est prévu pour traiter de l’évaluation. Préparons-nous bien nos futurs enseignants en matière d’évaluation de compétences ?

5 – Finalement le bulletin, qui s’est malheureusement politisé et dont on peut questionner aujourd’hui la cohérence comme outil de communication pour rendre compte de la progression du développement des compétences.

Dans ce contexte, vous comprendrez que le sujet de l’évaluation est plus complexe qu’une note au bulletin et que tous les systèmes d’éducation dans lesquels j’ai eu la chance d’évoluer se butent aux problèmes inhérents à l’évaluation. Croire que l’évaluation des connaissances rend l’acte d’évaluer exempt de jugement est certes une erreur, mais il est nettement plus facile de rendre important ce qui est facilement mesurable plutôt que de rendre mesurable ce qui est réellement important.

Sébastien Stasse

Une réflexion au sujet de « Au delà des notes »

  1. Comment vous remercier pour avoir pris la plume afin d’éclairer un sujet aussi névralgique et pour l’avoir fait de façon aussi pertinente et limpide! Merci!

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