Le scandale des photos de célébrités … et nos enfants

Il fut un temps où on ne savait pas si la photo que nous avions prise allait être bonne avant d’avoir entre les mains une copie papier (mat ou glacé) de celle-ci. Il fut un temps où il fallait prendre entre 12 et 36 photos avant de pouvoir les « développer » pour les voir. Il fût un temps où il était très gênant d’aller récupérer des photos « compromettantes » développées au magasin par un technicien (surtout s’il vous disait qu’elles étaient bien réussies).

Démocratisation de la photo

Mon premier appareil numérique, en juin 1995, a été un Quicktake 150 de Apple, qui fonctionne toujours  et dont je me fais un plaisir de vous partager la photo …

Cet appareil pouvait prendre environ 25 photos (selon la qualité) et nécessitait ensuite d’être branché sur un Mac ou un PC afin de  télécharger et de voir les photos. Pouvez-vous imaginer le nombre de photos que j’ai  pu prendre à partir du moment  où chaque photo était « gratuite » ? Ce fut la fin des limites sur ce que je pouvais photographier parce que, à partir de ce jour, c’est moi qui en contrôlait le téléchargement sur mon ordinateur, sans frais.  Plus jamais besoin de passer par le technicien de Direct Film au sourire complice. (Je ne peux m’empêcher de mettre ce lien vers une publicité de ce magasin)

Les gens nés dans les années 1990 n’ont jamais connus l’époque de ce passage de la caméra à film vers le numérique. La photo s’est démocratisée à partir de 1995 avec l’apparition des appareils numériques grand public.  Bien évidemment, les sujets photographiées ont sans aucun doute dépassé les prudes limites de jadis !  La prise de photos est donc petit à petit devenue un geste banal allant même jusqu’à être intégrée au téléphone intelligent qui, entre nous, n’a plus grand chose d’un téléphone.   Entre la photo et la vidéo, en numérique, il n’y a qu’un pas … et nous voilà donc aujourd’hui avec dans notre poche l’équivalent d’un appareil photo numérique, d’une caméra vidéo avec en plus la possibilité de publier le tout en temps réel ou de le partager « dans le nuage » pour le synchroniser entre nos appareils.

 The Fappening ou le Celebrity Leak

Faut-il donc s’étonner de la publication, la semaine passée sur 4chan, d’un lot impressionnant de photos d’artistes « légèrements vêtues » piratés sur des comptes en ligne ? On sera peut-être soulagé d’apprendre que le piratage semble provenir d’une technique « classique » et non d’une faille de sécurité. Mais une chose est certaine, les photos ne proviennent pas d’un appareil volé ou d’un ordinateur. Les photos proviennent « du nuage ». Si des adultes, que j’imagine conscients de l’impact possible de leurs clichés, prennent tout de même la chance d’en faire… j’ose imaginer ce que c’est pour nos enfants et ados qui ont ces appareils entre les mains. D’ailleurs, une étude d’opinion de Opinion Way indique qu’un quart des 18-35 partagent sciemment des photos d’eux dénudés.

À qui revient donc la responsabilité de parler de ces nouvelles pratiques aux jeunes (et aux moins jeunes) ? Le sexting (textopornographie ou sexto) est déjà bien réel chez nos ados, le dedipix (dédicace par image) a sa popularité sur certains réseaux sociaux d’adolescents et l’apparition des réseaux de type Vine contribuent a générer du matériel vidéo « à risque » qui circule sur le Web. L’école a-t-elle un rôle à jouer devant l’omniprésence du « nuage numérique » et surtout de la pérennité (parfois embarrassante) de ce qui est publié sur le web ?  Les parents sont-ils les mieux placés pour sensibiliser leurs enfants à ces enjeux ?

 

Mais un peu à l’image des campagnes pour contrer les maladies transmises sexuellement où, plutôt que de prôner l’abstinence afin de freiner la propagation des infections, on cible plutôt la protection lors des rapports, il faudrait peut-être adopter une attitude semblable face aux nouvelles pratiques technologiques.  Éduquer aux médias sociaux, expliquer les paramètres de confidentialité, assurer un contrôle de ses données et de son identité numérique, utiliser des mots de passe « solides » … plutôt que de démoniser internet ! Ceci dit, la meilleure protection et le message aux enfants doit être de ne pas prendre de photos compromettantes d’eux-mêmes et de ne pas les partager. Pas facile dans un monde où les mineurs adoptent le look sexy, même dans les magazines de mode pour enfants (Vogue Kids) et avec le consentement d’adultes. Quels messages leurs sont envoyés ?

 

La liste des célébrités touchées est impressionnante … tôt ou tard, il s’agira de photos de mineurs … voici une belle opportunité d’en discuter dès aujourd’hui avec votre enfant non ?

 

Sébastien Stasse

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