Mobiliser une équipe s’enseignants autour d’orientations qu’on impose, c’est un peu comme demander à une équipe de faire du souque à la corde où chaque participant tire dans une direction différente et au moment où il le souhaite. Pour susciter l’intérêt et l’implication du milieu encore faut-il que le milieu se sente concerné. Loin de moi la prétention d’avoir en main une recette miracle ou une solution «clef en main» mais comme direction d’établissement, je me suis donné comme défi de partir des orientations choisies par mon équipe-école pour arrimer mes actions . Encore faut-il arriver à faire émerger des orientations communes. Voici donc la démarche que j’ai mis en oeuvre pour y arriver.
Dans le cadre d’une journée pédagogique, la première étape de ce processus a été de demander à chaque enseignant d’identifier deux éléments positifs dans leur école. Des éléments qui touchent directement l’élève et qu’il est souhaitable de préserver dans le milieu. Ces éléments ont été écrits sur des papiers de couleur verte.
La seconde étape a été d’identifier individuellement deux éléments qui seraient à améliorer et qui touchent aussi directement l’élève. Ces éléments ont été inscrits sur des papiers de couleur jeune.
Une fois ces 2 étapes complétées, on se retrouve avec un nombre impressionnant d’aspects positifs et de points à améliorer de tout genre. Chaque élément contribue à ce que j’appelle la «culture» de l’école, c’est-à-dire la fierté et le mécontentement du milieu. Ces éléments cernent assez bien ce qu’il faut garder et ce qu’il faut changer. Cependant, ces éléments sont trop nombreux pour arriver à créer une réelle mobilisation de l’ensemble des intervenants. Il est donc nécessaire d’en diminuer le nombre. J’ai donc demandé aux enseignants de se regrouper en équipe cycle avec au moins un spécialiste (pour nous anglais, arménien, éducation physique) et de partager d’abord un aspect positif avec leur sous-groupe et ensuite et de s’entendre pour sélectionner deux points à améliorer qui pourraient devenir nos orientations pour la prochaine année. Mais comment «s’entendre» ?
L’important à ce stade-ci n’est pas la formulation des orientations même, mais plutôt la mobilisation de l’équipe autour de quelques éléments. Pour s’entendre autour de deux éléments communs au sous-groupe, j’ai donc eu recours à un principe de sociocratie : le consentement sans objection importante et raisonnable. Il ne s’agit donc pas d’avoir une unanimité, mais plutôt de faire émerger 2 orientations autour desquelles il n’y a pas d’objection de la part des membres du groupe. Cette façon de procéder a pour grand avantage de faire vivre aux enseignants une autre façon d’arriver à « s’entendre ».
L’ensemble des aspects positifs se trouvent donc réduits de beaucoup, dans notre cas, à 8 éléments. De ces 8 éléments, en plénière, on arrive à les regrouper autour de 3 ou 4 qui serviront de base aux orientations pour l’année scolaire. Ces orientations serviront à l’élaboration du projet éducatif de l’école et auront le grand avantage de provenir du milieu.
Voici donc les éléments qui ressortent de ce processus :
– Encadrement des élèves
– Responsabilisation des élèves
– Expression en français
– Identité culturelle arménienne
À partir de ces éléments qui font consensus dans le milieu, je vois ensuite la tâche de directeur comme les rails d’un chemin de fer. Un rôle consistant à garder le cap du train à long terme en permettant aux acteurs du milieu d’en être la locomotive. Il s’agit donc de m’assurer que presque chaque action est en lien avec l’une des orientations et de rappeler quotidiennement au milieu là où on s’en va.
Reste ensuite à définir les objectifs et les moyens à mettre en place pour y arriver, ça fera l’objet d’un autre billet !
Sébastien Stasse
À la lecture de cet article, j’ai bien ri, et j’explique la raison.
Lors de ma récente préparation pour un exposé sur le servant leadership de monsieur Robert K. Greenleaf, j’ai pensé expliquer la façon dont nous procédons dans mon milieu scolaire pour régler des problèmes internes qui concernent tout le personnel, mais qui touchent directement les élèves. Mon intention était de devenir porteuse d’idées, porteuse de projets. Voilà que sous cette rubrique, Sébastien Stasse, s’y retrouve avec la même finalité que moi, mais à quelques différences près, en ce qui concerne les moyens mis en place.
Sur ce coup, j’ai été devancée. Par contre, ce que je peux vous communiquer, c’est que j’ai été étonnée et en même temps heureuse de constater que l’on n’est pas la seule institution à utiliser cette approche dans les situations de résolution de problèmes. Selon moi, en agissant ainsi, on vient répartir le pouvoir, ce qui n’est pas négligeable pour une direction. De plus, on utilise le principe de sociocratie, c’est-à-dire de devenir un organisme vivant qui s’auto-organise. On applique également des théories systémiques, on se retrouve avec un ensemble organisé. On devient aussi des leaders utiles, car nous sommes tous au service du bien commun de l’institution et de la collectivité. Tout cela est très louable, n’est-ce pas ?
Bref, selon moi, personne n’est laissé pour contre dans cette expérience, bien au contraire, nous en sortons plus forts et les élèves mieux servis.
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