L’école privée, c’est aussi …

Alors que le débat sur le financement des écoles privées refait surface, que les principales critiques portent sur le système de sélection des élèves, sur l’accueil d’élèves à besoins particuliers ainsi que sur l’aspect confessionnel de certains établissements, j’aimerais exposer une autre réalité propre à certaines écoles privées, dont la nôtre, et qui aurait peut-être avantage a être connue.

Notre école n’a jamais sélectionné ses élèves en fonction de leurs notes. Depuis plus de 40 ans, nous recevons des enfants issus de familles souhaitant garder vivants leur héritage ainsi que leur culture arménienne au sein d’une société québécoise francophone qu’elles ont choisie. Au-delà de l’enseignement de la langue arménienne, où nous mettons l’emphase sur l’oral, nos élèves sont en contact avec l’histoire de leurs racines, autant par l’intermédiaire des cours d’arménien que par la présence des arts, dont la chorale et les danses traditionnelles arméniennes.

Tous nos élèves parlent au moins trois langues, dont l’anglais et le français. Nos élèves sont presque tous bilingues dès la 4e année et nos finissants de 6e année réussissent déjà sans aucun problème l’examen d’anglais langue seconde de 5e secondaire. Le temps consacré à l’enseignement du français dépasse les prescriptions du ministère de l’Éducation du loisir et du sport afin d’assurer à nos élèves une bonne maîtrise de cette langue dans un contexte où très souvent il ne s’agit pas de leur langue maternelle. Un programme particulier de théâtre supporte l’apprentissage de la langue et notre projet de 180 chansons francophones en 180 jours est un exemple de notre engagement à initier les enfants à la culture francophone, plus particulièrement québécoise, de façon créative. Tous nos enseignants, responsables de l’application des programmes de formation prescrits par le ministère, sont légalement qualifiés pour enseigner au Québec et aucun cours de religion n’est dispensé dans nos classes.

En 2011-2012, 70% de nos parents recevaient une réduction financière permettant  ainsi à leurs enfants de fréquenter notre établissement. Le restant du financement, nécessaire à la survie de notre école, provient de dons privés de la communauté arménienne dont notre organisation mère, l’Union Générale Arménienne de Bienfaisance, un organisme international.

Notre classe de francisation accueil des élèves immigrants et réfugiés de pays comme l’Égypte, la Syrie et l’Irak. Pour la majorité de ces élèves, la seule langue parlée est … l’arménien, parfois l’arabe. Le milieu sécurisant d’une école communautaire comme la nôtre où ils peuvent au moins s’exprimer et être compris dans leur langue vient sans aucun doute porter un baume sur le déracinement vécu par ces enfants et leur parachutement dans une autre culture. Les ressources en orthopédagogie, en pédopsychiatrie, en orthophonie et en psychologie que nous mettons à leur disposition, par le biais d’intervenants parlant leur langue, permettent à ces enfants de dépasser les traumatismes vécus dans leur pays d’origine. L’encadrement ainsi offert permettra à ces élèves de s’approprier une nouvelle langue en même temps qu’une nouvelle vie. Ces services, qui ne sont pas sans frais compte tenu de l’impossibilité pour notre école d’obtenir un financement pour de l’aide aux enfants en difficultés, sont donc absorbés en bonne partie par notre établissement, parfois avec l’aide financière des parents. Dans un contexte où les familles sont de nouveaux arrivant, leurs ressources financières sont souvent très limitées.

Depuis cette année, faisant suite au fameux printemps arabe, nous avons mis en place un programme particulier afin d’accueillir des enfants de la communauté égyptienne coptes avec qui notre communauté entretient historiquement des liens étroits. Ce rapprochement témoigne de notre intérêt à jouer un rôle dans l’intégration des nouvelles communautés.

Nos élèves ne sont donc pas sélectionnés en terme de résultats scolaires, de performances sportives ou de la capacité de payer des parents, mais plutôt en fonction de leur intérêt à apprendre trois langues dans un milieu d’enseignement en français et à recevoir une base en histoire de l’arménien, histoire qui est aussi celle du Moyen-Orient et par la suite du monde civilisé.

Dans ce contexte, plutôt que de généraliser le cliché d’un modèle d’école privée qui n’est pas le reflet de la réalité de l’ensemble des établissements, et de dénigrer des institutions qui sont souvent loin d’être élitistes, il faudrait peut-être simplement s’attarder aux autres modèles d’écoles privées qui font leur part pour recevoir une clientèle variée. De plus, l’autonomie de notre école permet à notre établissement de répondre adéquatement  et rapidement aux besoins particuliers des élèves, mais surtout d’avoir la marge de manoeuvre nécessaire pour allouer les ressources (humaines, technologiques, matérielles et financières) à la réussite de tous nos enfants, tel que le prévoit le programme de formation de l’école québécoise.

Sébastien Stasse

2 réflexions au sujet de « L’école privée, c’est aussi … »

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