Le plagiat à l'ère des réseaux sociaux

Notre système éducatif entier doit s’adapter, il ne peut plus faire comme si tout était comme avant et les exemples de dysfonctions se multiplieront dans les prochains mois et les prochaines années. Un seul exemple, le principe même du devoir dans le cahier d’exercices, qui était déjà en voie de disparition depuis longtemps, est définitivement mort le mois passé dans l’une des classes de notre école …

Nos enfants sont plus réseautés que jamais. Jeux en ligne, Facebook, Twitter les relient  de façon virtuelle, mais en plus, les appareils mobiles accentuent l’instantanéité des échanges. Dans l’une de nos classes, l’un des devoirs hebdomadaires consistait à répondre, à la maison, à des pages d’un cahier d’exercices. L’enseignante utilisait ce matériel complémentaire pour renforcer des notions en grammaire dans un milieu où la maîtrise de trois langues est un défi quotidien. Voilà que la semaine passée, en corrigeant les cahiers, elle se rend compte que plusieurs des réponses (ou plutôt erreurs) sont semblables. Après une courte enquête, elle découvre que depuis quelque temps, à tour de rôle, un élève du groupe complète le devoir en question à la maison, en fait une photographie à l’aide d’un appareil mobile pour ensuite l’envoyer aux autres via Facebook.

On se trouve donc devant un cas de plagiat, généralisé à l’ensemble de la classe.

Il faut dire qu’à notre école, l’usage des appareils mobiles est autorisé en classe, à condition que l’enseignant le permette. Nous parlons d’une école qui reçoit une clientèle de la maternelle à la 2e secondaire. L’enseignante utilise quotidiennement un iPad dans sa classe et gère sans problème l’utilisation des appareils mobiles par ses élèves. La photo «problématique» et son transfert ont eu lieu à l’extérieur des murs de l’école et notre politique d’utilisation des appareils mobiles encadre l’utilisation des fonctions de photographie à l’intérieur des limites de l’école. Mais soyons réaliste, la photo aurait aussi pu être prise et transférée de l’école … le cas de plagiat reste donc entier.

Je reçois donc l’enseignante à mon bureau, où elle me fait part de sa colère de voir que les élèves agissent de la sorte et songe à remettre en question l’utilisation des appareils mobiles dans sa classe par les élèves. Ma réaction spontanée a été de lui dire que, même si le geste était répréhensible, je trouvais les élèves très astucieux d’avoir utilisé un tel outil pour arriver à leurs fins. Évidemment le principe du plagiat, reste inacceptable, mais force est d’admettre que ce que les élèves faisaient avant dans l’autobus scolaire, à savoir recopier les devoirs d’un cahier d’un autre, ils peuvent maintenant le faire avec plus d’aisance, à n’importe quel moment de la journée et surtout en faire «profiter» un plus grand nombre qu’avant. Le problème de la copie de devoir n’est en soit pas nouveau … ce qui l’est, c’est la façon de le faire.

Sans lui proposer de solution, nous échangeons sur l’impossibilité de gérer les réseaux sociaux à la maison et sur la difficulté de mettre en place des mesures coercitives pour empêcher les élèves d’échanger ce genre de contenu à l’extérieur de l’école. Je m’imagine mal me promener sur Facebook pour traquer les photos de devoirs … Le plagiat reste cependant un élément présent dans notre code de vie (art. 3.7) et il peut être sanctionné et même aller jusqu’à la suspension et éventuellement le renvoi.

Nous nous entendons sur le fait que les choses ne sont plus comme avant et que manifestement dans ce contexte, ce genre de devoir risque de ne pas donner les résultats escomptés. Outre la déception de constater que les élèves ne comprennent pas l’utilité de ces devoirs, l’enseignante me dit qu’elle va penser à tout ça et revenir me voir un peu plus tard.

Je vous propose la fin de cette histoire dans quelques jours …

Sébastien Stasse

Outiller pour vaincre l'intimidation

Les événements d’avant Noël entourant le suicide de Marjorie Raymond m’ont profondément troublé. Comme parent, je trouve inconcevable que des enfants refusent même de se rendre à l’école parce qu’ils se sentent terrorisés de devoir faire face à leurs agresseurs. Comme directeur d’établissement, je trouve inacceptable que des enfants ne trouvent pas à l’école le climat de paix nécessaire aux apprentissages et à leur épanouissement. Par ailleurs, on le sait bien si on a été enseignant : l’affectif précède le cognitif … un élève qui doit faire face à de l’intimidation n’est certes pas placé dans les meilleures conditions pour apprendre et donc pour réussir.

La récente annonce d’une stratégie gouvernementale de mobilisation de la société québécoise afin de lutter contre l’intimidation et la violence à l’école est certainement un autre pas dans la bonne direction, puisque plusieurs établissements avaient déjà mis en place des politiques et des programmes pour contrer ce fléau. Je trouve cependant regrettable quand on généralise que les directions d’école ne font rien pour enrayer le problème …

Comme directeur d’établissement, j’ai beau mettre en place des règlements par le biais du code de vie de l’école, élaborer des politiques strictes pour les élèves en regard à l’intimidation et à la violence, sensibiliser le personnel de l’école, mener des campagnes auprès des enfants, il n’en demeure pas moins que la gestion de ce problème est loin d’être aussi simple que d’appliquer une recette qui fonctionne à tout coup. Parce que l’intimidation, ça se traite autrement qu’en suspendant des élèves ou en les mettant à la porte et que c’est aussi la responsabilité de l’école que d’éduquer les enfants, autant les victimes que les agresseurs, pour enrayer le cycle de l’intimidation.

J’oserais dire que quand il s’agit d’un problème de harcèlement physique ou de violence, la chose est plus « facile » à identifier et à régler. On a des faits, des éléments précis sur lesquels se baser pour sévir contre les responsables ou les encadrer. Quand il s’agit de cyberintimidation, encore ici les éléments de preuve, les traces, sont assez faciles à rassembler pour en arriver à identifier les coupables. Dans les quelques cas de la sorte auxquels notre institution a dû faire face au cours des dernières années, je dirais que nous avons fait un bon travail. Mais quand il s’agit de harcèlement verbal, d’intimidation psychologique, c’est un tout autre problème.

Notre école est loin d’être un lieu que l’on pourrait qualifier de violent. Pas de drogue, pas de gang et des parents majoritairement impliqués dans l’éducation de leurs enfants. Reste que des cas de harcèlement sont tout de même présents, surtout hors de la classe et malgré le nombre important de surveillants déployés cette année. Par le biais d’une composition sur le sujet auprès des élèves d’une classe, une enseignante m’apprenait que la moitié d’entre eux disaient avoir été victimes d’intimidation à l’école depuis la maternelle. Il s’agit en fait plus souvent de remarque désobligeante sur leur taille, leur poids, leurs fréquentations, leurs habiletés sportives, mais aussi parfois des mots blessants, de la méchanceté ou des rumeurs inventées pour nuire à leur image. Le terme intimidation est parfois utilisé à bien des sauces, je crois qu’il faut être prudent afin de bien identifier de quoi il s’agit pour y apporter la meilleure solution possible. Les jeunes enfants savent être cruels entres eux, parfois plus que les adultes, mais ils ont aussi cette naïveté qui fait en sorte qu’ils ne pèsent pas toujours l’impact de mots ou de gestes. Je crois donc que c’est surtout par l’éducation, dès la maternelle, qu’il faut agir en donnant des outils aux enfants et aux intervenants en milieu scolaire. Comment réagir quand des paroles nous blessent? Comment agir quand on est témoin d’intimidation? Comment parler de ce qu’on ressent?

C’est que l’intimidation, ça ne concerne pas que les enfants. Si comme adulte je ne suis pas en mesure de savoir quoi faire en cas d’intimidation, si je banalise le problème ou si  je suis moi-même une victime, serai-je en mesure d’aider l’enfant qui subit de l’agression? Et d’ailleurs, qui d’entre nous n’a pas été victime un jour de remarques désobligeantes ou blessantes? Quelle a été notre réaction? Agirions-nous de la même façon aujourd’hui? Comme parent, avons-nous les outils et la connaissance suffisante du sujet pour intervenir de façon adéquate ?

La première étape pour faire cesser l’intimidation dans un milieu, c’est de reconnaître que le problème existe. Selon des études canadiennes, 1 incident d’intimidation survient dans les cours d’écoles du pays toutes les 7 secondes. De plus, dans 1 agression sur 5 qui est signalée, la victime est un enfant de moins de 18 ans. Une fois qu’on reconnait le problème, il faut ensuite trouver les ressources pour outiller le personnel, mais surtout les enfants.

Certains milieux disposent de professionnels en mesure d’aborder la question et de fournir le support nécessaire. Notre milieu n’a pas hésité à recourir aux services d’un organisme sans but lucratif qui a su s’adapter à nos besoins et répondre à nos attentes.

Parce que l’intimidation c’est l’affaire de tous … et qu’il est du rôle de l’école de donner aux enfants des outils concrets pour agir.

Sébastien Stasse

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Leadership et accompagnement

Ce billet est en fait un raccourci pour les participants à la journée « Enseigner et apprendre avec un iPad » organisée par la compagnie Apple à Montréal le 31 janvier 2012. Vous trouverez ici le lien vers l’exploration (le premier d’une série de 12 billets) réalisée dans notre établissement avant d’étendre l’utilisation des iPad dans notre milieu.

Voici aussi l’atelier présenté en collaboration avec 3 autres enseignants (Stéphane Brousseau, Corinne Gilbert et Alexandre Riopel) au congrès de l’AQUOPS en 2011 présentant des SAÉ pouvant être réalisées entièrement sur iPad.

Finalement, les quelques diapositives de ma présentation « Leadership et accompagnement, la clé pour enseigner et apprendre avec les iPad ».

Sébastien Stasse