Médias sociaux et appareils mobiles à l’école, tensions entre la gestion, l’encadrement et l’interdiction, 2e partie.

Voici la dernière partie d’un article publié dans la revue « Le point en administration de l’éducation » Vol 15 No 2.

Une posture

L’école Alex Manoogian vit au rythme d’un réseau sans fil ouvert depuis 12 ans.  Pas de sites bloqués, pas de mot de passe, mais une éducation et un encadrement de tout instant visant à former des citoyens numériques responsables et sensibilisés aux nouveaux médias. Tous les appareils mobiles sont la bienvenue dans notre établissement, autant ceux des élèves que du personnel. Les parents des élèves sont d’ailleurs invités à munir les appareils de leurs enfants de dictionnaires et de conjugueurs, de puissants outils qu’ils pourront réutiliser en dehors du cadre scolaire. Pour mettre en place cette approche, il a d’abord fallu s’assurer d’éduquer nos élèves à l’usage du Web puis de concevoir avec les enseignants une politique d’utilisation et d’encadrement des appareils sans fil et du réseau.

À cet égard, les technologies semblent tout de même très peu présentes dans notre projet éducatif. Une seule mention :

 «Préparer nos élèves aux nouveaux défis du 21e siècle en leur offrant un enseignement de qualité orienté sur l’apprentissage de trois langues et la mobilisation des technologies informatiques»

Le terme mobilisation a été choisi avec grand soin. Il décrit en fait l’ensemble de notre vision en matière de nouvelles technologies : utiliser les technologies lorsqu’elles sont pertinentes pour supporter l’apprentissage, mais aussi pour supporter l’ensemble de notre projet éducatif. À cet égard, chacun de nos enseignants dispose d’un iPad depuis maintenant 2 ans. Dans la foulée de nos orientations, ces appareils servent entre autres à la gestion du courriel, mais aussi à diverses autres tâches administratives et pédagogiques. Ces appareils supportent notre projet de 180 chansons en 180 jours où les élèves de tous les niveaux écoutent une chanson francophone différente par jour à chaque cycle. Les chansons sont donc stockées sur les iPad de chaque enseignant. Ce projet est en lien direct avec l’une de nos orientations qui consiste à éveiller les élèves à la culture francophone.

Donc, bien avant l’usage des médias sociaux ou du Web 2.0 en classe, nous avions déjà mis en place ce qu’il fallait pour s’assurer de leur intégration via les outils qui en sont aujourd’hui leur support.

 

Des usages des médias sociaux et du Web 2.0

Côté éducation, il y a 10 ans, notre cours de Web averti se donnait en 1ère secondaire …. aujourd’hui tous les élèves de 3e année reçoivent cette formation portant sur la recherche sur le web, sur la sécurité sur internet ainsi que sur la protection des renseignements privés.  Plusieurs d’entre eux sont, en effet, déjà présents sur certains réseaux sociaux. En 5e année, les élèves publient une page Web publique. Cet exercice, leur demandant de limiter les informations personnelles de façon à ce qu’un inconnu ne puisse pas les retracer, leur permet de contextualiser leurs apprentissages des règles de protection des renseignements personnels.

En 6e année, les élèves sont initiés aux blogues. Sous forme de commentaires laissés chaque semaine dans le cadre de la question de la semaine sur le site de l’enseignante ou dans le cadre de notre projet « Un chien dans la classe« . Au secondaire, ils seront alors en mesure de gérer leur propre blogue.  La démarche d’un blogueur permet de développer la pensée critique, mais aussi l’organisation de ses idées.

Les pages Facebook de classe sont utilisées seulement au secondaire, de façon à ne pas contrevenir aux conditions d’utilisation de la plateforme qui nécessite un âge minimum de 13 ans pour s’y abonner. Il reste que ce média est plus efficace que les agendas lorsqu’il est temps de rappeler la remise d’un travail aux élèves. C’est aussi un outil utilisé pour informer les parents.

Plusieurs de nos enseignantes utilisent la plateforme de Wikis de l’école pour diffuser leurs pages de devoirs et informer les parents des projets à venir. Ces mêmes wikis sont aussi utilisés pour diffuser du contenu produit par les élèves.

Notre site web, propulsé par notre serveur WordPress, est enrichi par au moins 6 intervenants de l’école ayant des droits d’édition.  Il s’agit d’enseignants, de membres de la direction, de personnel non enseignant et d’élèves. Cette collaboration permet de garder le site continuellement à jour tout en impliquant l’ensemble du milieu.

En résumé, chaque membre du personnel mobilise la technologie (iPad, ordinateur ou appareil mobile), le média social ou l’outil du web 2.0 qui convient le mieux à ses besoins, au moment où il en a besoin tout en pouvant bénéficier d’un accompagnement personnalisé.

 

Et les appareils mobiles

Les appareils sont donc la bienvenue chez nous. Les élèves peuvent les utiliser en classe, avec l’accord et sous la supervision des enseignants pour supporter diverses activités pédagogiques. Une charte, disponible à l’entrée de notre établissement, encadre tous les aspects de l’utilisation des appareils (autant par le personnel, les visiteurs que les élèves) nécessitant ou non une connexion à notre réseau sans fil. Ainsi, plutôt que de se lancer dans une chasse aux sorcières visant à traquer les appareils mobiles et leur utilisation, les mesures mises en place visent à gérer et à encadrer leur présence, aujourd’hui inévitable.

 

Un modèle adapté au milieu … en prévision de demain

La recette miracle ou la solution clé en main n’existe pas en matière d’utilisation des médias sociaux ou de gestion d’appareils mobiles en milieu scolaire. Les différents éléments présentés dans cet article ont tous fait l’objet de très nombreux ajustements grâce à la collaboration quotidienne des différents intervenants de notre milieu. L’ingrédient essentiel demeure donc cette collaboration permettant de mettre en place une politique et un usage adapté à la particularité de chaque institution selon les besoins de l’équipe-école.

Aujourd’hui nous parlons de iPad, de Facebook ou de téléphones intelligents.  Demain, pour les élèves de la maternelle qui gradueront dans 6 ans, ces technologies seront déjà des reliques de musée remplacées par des technologies dont nous ne soupçonnons pas l’ampleur, mais qui se retrouveront sans aucun doute aussi aux portes de nos institutions scolaires. La technologie évolue à un rythme effarant et les jeunes s’approprient non seulement plus vite que nous ces technologies, mais en plus, cette nouvelle génération la mobilisent au quotidien au travers d’appareils qui font maintenant partie intégrante de leur vie.

Le statu quo n’est donc plus acceptable et on ne peut ignorer l’omniprésence de ces appareils dans nos milieux, présence qui ne pourra que s’accentuer au fil des années.

Comme intervenant en milieu scolaire le grand défi sera de se tenir à jour des possibilités offertes par ces technologies, certainement par le développement professionnel, la formation continue et l’accompagnement du personnel.

 

Bibliographie

CEFRIO, Cinq générations d’internautes: profil d’utilisation des TIC en 2011, (PDF)

L’ABC d’un blogue

Charte d’utilisation du réseau sans fil et des appareils mobiles

Site WEB de l’école Alex Manoogian

 

 

 

 

 

 

À propos des tablettes en éducation

Le iPad mini est parmi nous ! Nous n’avons qu’à bien nous tenir puisque Apple nous propose un autre outil qui devrait révolutionner l’industrie … du moins c’est ce que la compagnie prétend ! Qu’en est-il vraiment de cet appareil, mais aussi de l’arrivée des tablettes en éducation. Voici une réflexion, partagée lors d’échanges entre amis acteurs du milieu de l’éducation.

Le iPad mini

Utilisateur régulier d’un iPad depuis son lancement, je suis passé à une utilisation quotidienne du iPad mini depuis maintenant 2 semaines et je suis tout simplement séduit par cet appareil. Quelques éléments m’enchantent plus particulièrement, dont la possibilité d’écrire (avec les pouces) sans avoir à déposer l’appareil, la légèreté et le caractère minimaliste (la dimension) du produit qui possède pourtant une grande puissance. Le modèle plus gros ne me manque pas, quoique le visionnement de films est une expérience moins « englobante » due à la taille de l’écran, mais la qualité de l’image est époustouflante. J’utilise mon iPad pour la prise de notes lors de réunion et de cours  à l’université, pour toutes mes lectures (journaux, articles et magazines), pour ma veille pédagogique  (Twitter, LinkedIn et Google +), pour mes présentations et conférences et bien entendu pour le divertissement.

Donc, pour ma part, la transition du iPad 2 au iPad mini est presque transparente et je n’ai pas l’intention de revenir en arrière. Il reste à tester la machine avec des applications de création multimédia, et à la mettre à l’épreuve en salle de classe, ce que nous ferons dans notre milieu dans les prochaines semaines auprès de nos élèves de la maternelle à la 2e secondaire.

La tablette en éducation

Le premier projet iPad dans notre établissement date d’il y a 3 ans, à la sortie de la 1re version. Depuis, après un projet 1 iPad par élève au secondaire que nous n’avons pas reconduit cette année, les élèves se partagent une quinzaine de iPad. Chaque enseignant possède le sien et l’ensemble de notre gestion scolaire (absences, entrée de notes, suivi) se fera sur cet outil d’ici la fin de l’année scolaire. L’an prochain, nous souhaitons revenir avec un projet 1 iPad par élève pour une de nos classes au secondaire et le choix du iPad mini s’impose de lui-même, mis à part deux aspects techniques (qualité de la caméra et puissance du CPU) qu’il faudra valider lors de notre expérimentation.
Mais bien au-delà de telle ou telle technologie, les tablettes ont tout simplement révolutionné le monde de l’éducation et l’une de leurs grandes forces est certainement la démocratisation de la conception d’applications ouvrant ainsi le chemin à un univers de possibilités, toutes matières confondues. Jamais depuis que je me suis intéressé aux TIC, il y a maintenant plus de 15 ans, je n’ai vu autant d’intérêt pour les technologies. Plusieurs écoles ont fait le saut, parfois à coup de 1000 machines pour un établissement, se lançant dans l’aventure pourtant remplie d’inconnues. Parfois pour des raisons pédagogiques, parfois pour des raisons de marketing, mais il n’en reste pas moins que les tablettes ont investi les écoles plus rapidement et avec une présence plus importante que ne l’ont été les ordinateurs.

La technologie est donc là, le cartable numérique une réalité avec l’arrivée des tablettes, mais il manque encore bien des éléments pour arriver à un résultat dépassant le simple usage du numérique. Je vous en propose deux.
Le premier écueil, c’est la gestion et l’offre des livres et manuels scolaires en numérique. Un vrai cauchemar où chaque maison d’édition a sa propre plateforme, standard et format. Imaginez quand en plus il faut gérer des codes d’utilisation, une inscription individuelle sur site et assurer l’assistance technique … Alors que le numérique pourrait offrir une expérience qui révolutionnerait le manuel scolaire, on en est encore à des formats de type PDF «permettant l’annotation», mais aux possibilités interactives limitées. On est loin du manuel complètement personnalisable par l’apprenant, enrichi par l’enseignant, permettant la collaboration, mais surtout permettant de tout contenir : références, notes de cours, exercices, évaluations, résultats scolaires et autres. Bref un vrai outil tout-en-un pour chaque matière.

Pas étonnant que certains enseignants et même certaines écoles choisissent de produire leur propre matériel et de s’éloigner des maisons d’édition. Le Collège Sainte-Anne de Lachine prévoit n’acheter aucun livre d’ici 2 ans.
Deuxième écueil : la formation. Je ne comprends pas que l’on s’entête encore à offrir des formations en groupe de 30 ou 40 enseignants de niveaux (matières et compétences TIC) différents et aux attentes différentes ? Alors qu’on demande aux enseignants de différencier leur enseignement, on est encore loin de l’avoir compris en matière de formation continue. Impossible aujourd’hui d’être spécialiste de la tablette dans toutes les matières en éducation. Là ou avant une poignée de logiciels étaient disponibles, la prolifération des applications, rend la veille « générale » presque impossible !  Et puis, est-elle vraiment continue cette formation continue ? Une ou deux rencontres par année et où le reste du temps l’enseignant est laissé à lui-même et où les plus férus et autodidactes s’en tireront le mieux. De ces formations de groupe ponctuelles, qu’est-ce qui finalement atteint vraiment les élèves ? Loin de jeter la pierre aux formateurs, je crois que le système d’accompagnement et de formation doit être repensé et adapté à la réalité d’un corps enseignant qui comprend autant des novices que des experts en TIC  … le fossé numérique est une réalité même en enseignement. À l’ère des Khan academy, des formations en ligne et des classes inversées les gestionnaires sont certainement en mesure de répondre aux besoins des enseignants … encore faut-il en faire une priorité et y allouer les ressources ! En ces temps de coupures et de remise en question des structures, le numérique est loin d’être une priorité.
Bref, ce que j’observe du numérique en éducation depuis 2 ans me fait prendre conscience que le virage est enfin enclenché, que le paquebot du système éducatif (en matière de TIC) commence à tourner. Malheureusement, au-delà de l’outil numérique (tablette, ordinateur, appareil mobile) c’est le système éducatif (financement, pratiques, formations, autonomie des écoles, ressources, etc.) qui arrive, dans plusieurs cas, difficilement à répondre aux besoins autant des enseignants que des élèves.

Dans 5 ans, les iPad seront des reliques … nous en sommes à la 4e génération de iPad après à peine 3 ans ! Le Wi-fi date de 1999 et certaines écoles n’en sont pas encore équipées ou alors inaccessibles … Bref, au-delà de ce que peuvent faire les outils, certains élèves n’y ont tout simplement pas accès, souvent par un manque de vision qui date déjà de quelques années.

Ce qui est le plus inquiétant … c’est qu’on parle de l’école de demain en se référant beaucoup trop à l’école d’aujourd’hui … Plus que jamais il faut pourtant innover en matière d’éducation, plus que jamais il faut se souvenir que les enfants en 1re année d’aujourd’hui évolueront dans 15 ans dans un monde que ne pouvons à peine imaginer … il faut les préparer à s’adapter à l’inconnu, et plus particulièrement en matière de TIC !
Sébastien Stasse

Grilles d'observation de compétences non-disciplinaires

L’instruction annuelle de 2012-2013 du MELS prévoit que la section 3 du bulletin unique  doit  comprendre,  aux  étapes  1  et  3,  des  commentaires  sur  deux  des  quatre  compétences suivantes :

exercer  son  jugement  critique,

organiser  son  travail,

savoir  communiquer  et

travailler  en équipe. 

 

Voici, sans prétention, 4 grilles d’observation susceptibles  d’aider les enseignants à porter un jugement sur le développement de ces compétences par les élèves. Ces grilles ne permettent pas d’évaluer tous les critères prévus dans le programme de formation de l’école québécoise (PFEQ) pour chacune des compétences, mais constituent une bonne base de départ pour étayer son jugement.

Jugement critique

Organiser son travail

Communiquer

Travailler en équipe

 

Sébastien Stasse